Normandie

Elle nous pénètre sans un mot

Par les yeux et par notre peau

La Normandie on la respire

Histoire de mieux la retenir.

Peintres capteurs de lumière

Écrivains aux jolies manières

Ils en ont fait leur paradis

Côte de Grâce, Côte Fleurie.

Le roi des ciels au bord de l’eau

Eugène Boudin et ses pinceaux

L’impressionniste immortalise

Le frissonnement d’une brise.

Belles villas sur la corniche

Ces élégantes qui s’affichent

Résistent aux embruns et à l’âge

Dans leurs habits de colombages.

Plus loin… vallons, tourbières, forêts…

Coteaux crayeux, landes, marais

Blanches falaises aux pieds dans l’eau

Côte d’Albâtre, Pays de Caux.

Les champs… des tapis de verdure

Vaches ruminent à la pâture

Paille au chapeau de la chaumière

Douillons de pommes et camembert.

Grand-mère le loupiot d’une main

Et le vélo de l’autre main

Souffle d’amour sur la blessure

Vite rentrons à la masure.

Sans les vacances chez grand-mère

Manquerait de l’eau au moulin

De la douceur sur les embruns

Ma Normandie, mon bout de terre

Je te choisis dernier lopin.

Publicité

Le piano

Il avait dormi si longtemps

Dans un petit appartement

Entre buffet et canapé

Le clavier toujours fermé.

Il est des morts dont on tait tout

Le couvercle est bien mis partout

Pas seulement sur le cercueil

Dans le tenir et dans l’orgueil.

Petit frère ce sont tes doigts

Qui ont dû la dernière fois…

Jouer sonate, jouer gavotte

Faire vibrer, chanter les notes.

Dans un petit appartement

Un piano disait l’absence

Un taiseux nous contait l’enfance

Les souvenirs d’une maman.

La boucle est bouclée


La boucle est bouclée…

Puisque rien ne peut se substituer dans ce voyage où l’on part seul, où l’on arrive seul.

Entre le départ, l’arrivée… un rêve, une de ces illusions qui sait très bien faire le job.

Leurre de l’esprit…

Que demande t-on à l’amour d’autre que de rallumer les étoiles sur l’immense toile de nos nuits ?
De coudre des ailes au dos de nos lourds manteaux et de nous délester de nos semelles de plomb ?

Ils ont dit : le réel.

Retour au réel
le présent a ses trous noirs
blanchis d’illusions

Qui du réel ou du rêve engendre l’autre ?

Le cerveau s’inventent des chimères quand la réalité est trop dure à supporter.
L’amour qui naît d’une blessure finit par en devenir une autre.

Le miroir cassé, on peut toujours se mirer dans le rétroviseur.

Aucun retour en arrière, mais superposition du réel avec le rêve qu’il a engendré.






Une initiation

Portée par l’invisible
Au seuil du vivant
Là où l’écho se brise
Faute de personne
Pour en recueillir
Le souffle

Une initiation…

Qui ne se fait pas
Par les livres

Lumière en la nuit
Énoncé du Verbe
Porteur du savoir
En l’indicible

Dans cet apprentissage
Sans autres lois
Que celles du cœur

Aux portes de l’inconnaissable.

La pureté du non-savoir.

La pureté du non-savoir.
Impossible à garder une fois passée l’enfance. Pureté des premiers regards.

Plongeon dans le rien, le non dévoilé, dans l’infini du mystère.

Le poète cherchera à retrouver cette singularité, cette unicité, dans le dépouillement, dans l’oubli des savoirs.

Sa quête ? Son propre univers primordial, non encore parasité avant d’être aiguillé dans les ornières de l’apprentissage.

L’Art du poète est peut-être de poser un regard depouillé de savoirs, au format qui serait celui d’un rêve universel, avec des mots sans plus d’âge, tant ils ont été employés, malmenés, revisités.





Un rêve lucide

La nuit dorée. Celle où les étoiles dansent derrière les paupières baissées.

Les réveils sont brutaux à l’inaccessible engendré par son propre désir.

Désir de vie…
Si proche de la mort qui l’enveloppe de son lange funeste.

Ô étoiles ! jusqu’au bout de la nuit venez encore danser.
Lueur vraie ou leurre qu’importe si lucide est ton rêve.

J’ai quinze ans aujourd’hui

Et si j’ai quinze ans aujourd’hui, c’est que je n’ai jamais été aussi proche de celle que je suis vraiment.

Sans le courage évidemment.
Sans l’insouciance naturellement.

Si :

Au dehors il pleut
en ton dedans c’est la nuit
n’hésite pas saute !

Le saut s’est fait tout seul ; une poussée d’avant en arrière, n’effaçant rien, ne reconstruisant rien, sans transformation, mort et résurrection.

La voie obscure, la traversée nocturne, il faut l’entreprendre, c’est le passage obligé sans quoi rien ne serait possible.

Ce qui te constitue à quinze ans tu le gardes toute la vie. Ce qui vient se greffer ensuite ne t’appartient plus en totalité.

La maladie, la mort des proches qui te sont chers, tu y fais face en bon petit soldat. Tu tombes cent fois, cent fois tu te relèves.

Tu t’oublies dans ce destin, tu avances parce qu’il n’y a pas d’autres solutions que d’avancer.

Tu n’as pas encore écrit. Tu écriras plus tard quand ton ventre ne sera plus comblé d’enfants, quand sans le savoir tu es déjà prête pour le saut qui viendra plus tard.

Ce n’est pas une régression, parce que ton corps se constitue bien, lui, de tous les âges de ta vie.
Non c’est plus philosophique que cela, plus symbolique, c’est l’essence même de ton être que tu retrouves, intacte dans sa force, sa puissance.
En rentrant ainsi à l’intérieur de ton être, tu ne t’isoles pas des autres, tu es juste leur égal. Tu peux te positionner et te faire respecter dans tes choix.


Il en faut du temps au temps pour arriver au dépouillement de l’être.

Sans autre refuge
que ce petit coin de l’âme
qui n’est pas blessé

Un jour arrive où nous finissons par nous ressembler, même s’il faut pour cela commencer par se rassembler, en enfilant ensemble les perles de douleur et celles de joie.






De la parenthèse enchantée que faudra t-il retenir ? Deux voiliers s’éloignant l’un de l’autre sous la contrainte de vents contraires.

De la parenthèse enchantée que faudra t-il retenir ?

Deux ailes écartelées au bleu d’un même ciel.
Deux âmes, de mêmes confluences, resserrées dans ce détroit ouvert au mystère. Bras de mer en recherche d’océan, bras d’enfant tendu vers la mère.

Deux voiliers s’éloignant l’un de l’autre sous la contrainte de vents contraires.

Signes ou cygnes, même blancheur que cette parenthèse, voiliers drapés de tulle qui en s’écartant forment un égrégore, ouvrent sur un océan d’amour.

 

 

 

 

 

haïkus en liberté

L’amour pacifié
les projections dépassées
l’amour unifié

Pauvre papillon
combien de métamorphoses
pour une seule vie

Sur l’être et la chose
c’est le regard que l’on pose
qui donne vie

Le dépouillement
de celui qui va mourir
sa conscience d’être

Les arbres passifs
quand sous l’emprise du vent
folles sont les herbes

Sur nos mondes ouverts
les limites de l’esprit
se cognent en aveugle

Il n’est pas venu
sur la vague du matin
le baiser du vent