Aimer, c’est glisser quelques fils d’éternité dans l’écheveau de la mort.

Aimer, c’est glisser quelques fils d’éternité dans l’écheveau de la mort.

Et si le plus bel acte d’amour était de ne pas retenir, de laisser partir…
Le mourant à qui l’on tient la main et que l’on voudrait garder sans avoir à desserrer l’étreinte. L’amoureux, l’amoureuse, qui hier encore trouver les mots aujourd’hui perdus, parce qu’ ils sont comme ça les mots d’amour, ils ont l’impatience du désir et son échappement tout aussi brutal.

Ce n’est pas trahir un sentiment, que de lui donner de l’espace, une respiration, un horizon.

-Quand l’amour n’est plus que d’un seul côté.
– Quand le regard n’est plus tourné dans la même direction.
– Quand l’amour est des deux côtés, mais que pour l’un des deux l’heure du départ a sonné.

Aimer, c’est prendre le risque de souffrir. De perdre son insouciance définitivement à la naissance de l’enfant, de connaître les premières blessures narcissiques de n’être pas l’élu, (l’élue) d’un coeur, de souffrir en sa chair la perte de l’être aimé.
Le monde soudainement vidé de substance, la mer sans plus de sel pour supporter le corps.
Aimer, c’est aussi connaitre l’ivresse des grands sommets, c’est vivre plusieurs vies en accéléré, respirer plus et mieux, voir au plus profond de soi et au-delà de ce qui nous a été donné. C’est accrocher à son ciel les étoiles qui ne meurent jamais, de celles qui diffusent leur matière au creux d’un cœur toujours plus incandescent.

Rien de tout cela n’existerait sans l’amour qui légitime sa contrepartie, la souffrance.

Quand la joie ne comble plus les manques, quand les manques font de l’ombre à la joie.
Partir avant de renier, de trahir, ce qui a été.

La fusion des corps ne serait rien sans l’union des âmes.

 

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Vagues rêveries


Coiffé d’un halo de brume, le jour pointait derrière la fenêtre. À l’intérieur c’était encore la nuit. Les lourds rideaux qui encadraient les ouvertures avaient été tirés pour laisser la chambre dans la pénombre.
Le temps ici ne semblait plus avoir d’importance. Les limites entre les mondes se fracturaient jusqu’au délitement. Il fallait remettre une chronologie, raccrocher le temps au monde réel.
Marie rêvassait. Sa pensée se perdait en de vagues rêveries.
Elle se revit petite fille, puis adolescente, jeune femme et maman. Elle ressentit les émotions de l’enfant et de l’adulte, vécut de nouveau les chagrins et les joies dans toute leur intensité. L’instant présent contenait tout son vécu. Elle comprit d’instinct que rien ne se perd, ni de nos pensées ni de nos actes. Que cet ensemble nous constitue autant qu’il nous dépasse et que se trouve tapie là, dans cette mémoire, sans cesse remaniée, renouvelée, jamais inerte, la composante de notre âme.

De cette âme limpide
Aucun mystère
À percer
Les secrets de la vie
Sont gouttes de rosée.

 

Coup d’oeil dans le rétroviseur. En attendant la suite.

En attendant la suite…

Coup d’oeil dans le rétroviseur entre deux réveillons.
L’heure est au bilan, au changement de cap, aux bonnes résolutions.

« Rien n’aura eu lieu que le lieu » 
Mallarmé

On compare, on fait du lien, on se souvient, on s’étonne à rêver encore.
Toujours un peu en retrait, à la marge. Le destin nous devance et quoi que nous voulions, que nous fassions, nous serons toujours à marcher dans son ombre.

Sans ses nuances, la pluie chagrine mon espérance.

Je cherche du charme à cette monotonie. Le sans vague se justifie par : cela pourrait être pire. C’est le verre à moitié plein.

Un arc-en-ciel après la pluie. Toutes ces couleurs dans le gris quand même ça vous changent un horizon.

Ce que l’on a gagné, ce que l’on a perdu, ce qui aurait pu être, dû être peut-être… si… si…

Demain peut-être. Tout peut se faire, se défaire. Il suffit d’une volonté.

Les oiseaux de l’estran n’ont pas laissé de traces sur le sable, ou si fines, si graciles… pareilles à quelques touches d’une poésie qui nous embarque.

À évoquer l’image c’est déjà en faire la poésie.
*

Une année se termine… Ami, as-tu compté
Tes peines et tes joies sur ton calendrier ?
As-tu fait de tes jours, de tes mois, de tes heures
Des semailles d’amour, des moissons de bonheur ?

A l’urgence de vivre, aux plaisirs du savoir
N’as-tu pas sacrifié ton premier des devoirs
Prendre soin de ton âme un peu plus chaque jour
Élargir ta conscience et son besoin d’amour ?

As-tu bien remercié du lever au coucher
De par ton corps de chair te mouvoir, respirer…
Changé en mélodie les sons qui te parviennent
Et nourri d’émotions ton cœur quoi qu’il
advienne ?

Quand ton ami blessé n’as-tu pas oublié
D’être sans l’envahir présent à ses côtés
As-tu fait honorable amende de pardon
Si tu étais l’objet qui assombrit son front ?

Aux multiples facettes une année le miroir
Un bout du fil d’Ariane une ode à ton histoire
Si tu peux t’y mirer chaque année fera trace
Mais si tout peut changer, jamais rien ne s’efface.

Pour celle qui arrive quitte à marquer ton cœur
N’oublie pas que la vie chaque jour naît et
meurt
Et que tu peux choisir au pire le meilleur
Les roses ont des épines et sont de jolies fleurs.

La magie de Noël

C’est le jour de Noël.

Et déjà la nuit tombe…

J’ai toujours préféré la veille, le réveillon…

Ce qui se trouve être dans l’attente, espéré, remanié par l’imaginaire, est toujours plus fort que sa réalisation.

Une petite lampe s’est allumée dans le cœur des hommes. Partout sur la toile des images saintes, des tableaux représentant la Nativité.

*

Magie de Noël

une trêve pour les cœurs

le temps suspendu

*

Période qui recouvre, pour un temps, les angoisses humaines, les soucis du quotidien. La vraie magie de Noël c’est de nous faire retrouver pour quelques heures, parfois quelques jours, notre cœur d’enfant.

N’oublions pas la fragilité de la vie. Tout peut s’arrêter d’un instant à l’autre. Les places libres de nos absents nous le rappellent particulièrement en ces périodes de fêtes.

Un je t’aime, un sourire, une main tendue… cela peut sembler dérisoire à ceux qui croient posséder la richesse et pourtant… si vient à manquer l’amour, là est la vraie pauvreté.

*

Venue de l’azur

une âme neuve au berceau

la terre étoilée

*

La présence invisible passe tous les obstacles.

Par le manque nous expérimentons la puissance de l’amour.

*

L’impossible voyage

Pour se faire

Il faudrait qu’il me pousse des ailes

Te visiter

Voir ton sourire

Puis revenir.

Sur le poids des jours

sous ses pluies ou ses soleils

plane ton sourire

À Blaise, Rémi, Gérard, Maman, Mémé, Papa parti cette année.

*

Combler l’impossible

seul l’invisible peut-être

en a le pouvoir

 

La présence invisible


La présence invisible oeuvre de son mystère
Dans un monde étranglé passe au grand ouvert
De mon songe fatal vous serez le Mentor
L’alchimiste qui peut changer le plomb en or
La tristesse infinie en la joie qui dévore.

Ressentez-vous ce souffle au creux de votre cou
C’est mon âme venue sans bruit, à pas de loup
Au dormant du désir déposer son frisson
L’amour n’a d’autre loi d’être sans sa raison
Et sa plus belle voix intime au diapason.





Ne rien gommer, tout réécrire

Ce passé qui n’avait pas eu lieu continuait d’œuvrer en profondeur, provoquant un certain vertige au présent. Un tourbillon imprévisible, tout droit sorti d’un vieux grimoire à regrets, irradiait sur le monde réel sa soif de merveilleux.

Entre le trop tôt et le trop tard une oscillation, un mouvement perpétuel d’un destin qui se jouerait du libre arbitre.

On pourrait croire que certains destins sont programmés pour ne jamais se réaliser quand les êtres ne sont jamais au bon endroit, au bon moment, à la bonne heure.

Ce qui n’a pas été vécu erre sur nos vies, fantôme du passé.

Ne rien gommer, tout réécrire.

Je fais le voyage à l’envers
Remonte aux sources des rivières
Aux méandres de la mémoire
Tous les reflets, tous les miroirs.

Demain à lui seul est un avenir.

Ne brisez pas mes illusions

Si je n’ai rien vu

rien entendu

rien compris

à ce monde

c’est que j’ai dormi debout

et que mes rêves

voient au-delà

de votre réalité.

*

Le vide me fait rêver, même si son fantasme serait d’être comblé.

Tisser une toile sur la non-présence, en faire un tableau avec ses propres couleurs. Comme on pourrait le faire pour un Dieu, omniprésent dans notre vacuité.

Ne brisez pas cette croyance que je fais mienne, de penser que ceux qui écrivent les plus belles choses sont beaux à l’intérieur.

Qui pourrait me blâmer de dessiner mon propre univers dans le multivers intellectuel qui nous entoure. Un monde où les hommes ressembleraient aux personnages de mes consolations enfantines.

J’aimerais rester en deçà du réel, dans une nostalgie qui n’en finirait pas d’attiser ses mémoires, afin de ne jamais briser le rêve.

Habiter ses rêves

jusqu’à mentir à la vie

finir par y croire

Les mots sans leur mystère sont des corps au tombeau. Gardons le mystère, pas seulement celui des mots, mais aussi des poètes et des écrivains qui les utilisent.

C’est quoi la vraie vie, sinon celle que l’on s’invente. Le mentir-vrai n’est pas un mensonge quand il reconstruit un monde qui nous échappe, celui de l’enfance.

Je ne mets pas seulement un visage sur le poète que je lis, je lui invente aussi une vie.

Un matin haut en promesses

C’était le matin. Un de ces matins délicieux, haut en promesses.

Avant cela, il y avait eu ce réveil en pleine nuit, l’éblouissement face à la voie lactée. Un ciel de montagne à la pureté couverte de myriades d’étoiles. Et encore avant cela, une journée chaude, trop chaude pour marcher ou paresser en plein soleil…. Une petite butte, suffisamment isolée pour me plaire, d’où je pouvais admirer un versant de la vallée. Je me suis installée sous l’ombre de son seul sapin, un livre entre les mains et tant de joies dans le cœur que les lieux doivent en avoir gardé le souvenir.

Un hélicoptère a dérangé un moment ma rêverie. Ses palmes faisaient office de grand ventilateur, mais n’a pas soufflé sur mon plaisir ni sur mon désir de retrouver le magicien des lieux.

Bien avant l’éveil des êtres et des choses… se vêtir à la hâte, sortir de sa moiteur, comme pour un rendez-vous d’amour.

Être prise par l’excitation du photographe qui ne veut manquer, sous aucun prétexte, l’imprécis des gris et des bleus, ces lueurs de l’aube précédant le basculement dans l’ocre et le rose, et toutes ces impressions au lavis d’un invisible basculant dans le visible.

Un instant unique et précieux que ce tête-à-tête ; vous, seule face au monde. C’est comme remonter le temps, se hisser jusqu’à son origine, faire partie du grand tout.

Avant que ne frémisse la cime des grands arbres sous la poussée du vent et que l’horizon ne s’aligne, le ciel, tel un sentiment non encore exprimé, balbutie au monde son émotion, son frisson d’aquarelle.

Bientôt quelques lumières dessineront le creux de la vallée, l’indistinct fera place au distinct.

C’était le matin. Un de ces matins délicieux, haut en promesses.

*

Sans réminiscence

par l’éternelle promesse

l’aube traversée

*

Comme une vague pleine attendue sur la grèveComme la fleur saisie par la poussée de sève

Je vous ressens si bien se peut-il que mes sens
De votre âme aient volé toute la quintessence ?
Le rêve inachevé porte en lui l’infini
Et vous êtes le soir et l’aube de ma vie

*
Ainsi en ce moment vous seriez près de moi
Que le ciel ne pourrait me donner plus de joie
Je rêve de matins tout frissonnants de fièvre
Sertis de fous baisers dont vous seriez l’orfèvre

*
On ne peut négocier au ciel l’inexprimable
L’indicible se mire aux vasques bleues des âmes
Aux ailes des moulins précieux est le vent
Tel le rêve à la vie son souffle tout autant

*
Comme une vague pleine attendue sur la grève
Comme la fleur saisie par la poussée de sève
Je vous ressens si bien se peut-il que mes sens
De votre âme aient volé toute la quintessence ?