Le nom s’est effacé
Mais un élégant vert
Amoureux de la pierre
A hissé sa bannière
Agrippé son mystère
Dans l’ombre et la lumière
En soif d’éternité.
La solitude de l’écrivain
“La solitude de l’esprit est la véritable solitude.”
Charles Hamel
La solitude de celui qui écrit…
Nul besoin d’escalader les montagnes, de chercher à franchir les rivières ou traverser les mers, là où un courant d’air peut passer, il y a déjà tout un monde qui se presse et nous entoure.
La place est vacante, personne qui ne puisse s’y tenir sans l’avoir d’abord implorée, c’est la place de l’absente, celle de la solitude qui se gagne le plus souvent quand on ne la cherche plus, et pourtant si précieuse à celui qui écrit.
Il suffit pourtant…
De faire un pas de côté, peut-être deux, et le voyage peut commencer.
Bien sûr nous sommes toujours traversés par les mêmes silences, les mêmes peurs, battus par les mêmes vents, baignés de même lumière, ce qui change c’est cette aptitude à sortir du cadre, à faire cavalier seul.
Hier et demain ne noircissent plus notre page, notre une s’écrit au présent. Le petit îlot étrangement semblable à tous les îlots regroupés en archipel, inséparable et pourtant isolé, a pris le grand large, s’est affranchi de ses frères par sa faculté à prendre du recul. Recul nécessaire pour mieux distinguer ce et ceux qui l’entourent, à commencer par lui même.
Il est tellement plus facile de regarder en soi quand l’horizon est dégagé.
C’est ce que fait l’écrivain, le poète, ce pas de côté vers la véritable solitude, celle de l’esprit, qui isole et finit parfois par relier.
Écrire pour retirer du silence au silence et se souvenir
Écrire pour retirer du silence au silence
« et puisse être la mort
cette chemise d’eau qui glisse du bras
après la nage
et que soit la tristesse
cette lumière répandue dans l’herbe
qui fera le soir venu
un autre ciel à la mémoire »
Jean-Pierre Siméon
Et ce soleil
Qui est venu te chercher
Ne pourra atténuer
La tristesse des vivants
Ce contraste à la nuit
Cette claque dans le silence
Et ce chagrin immense
Au matin
Était-ce pour te vêtir
Comme l’est la jeunesse
D’un habit de lumière
Ou bien pour nous dire
Que le deuil d’une mère
Emporte avec lui
Le cœur de toutes les mères
Écrire pour retirer
Du silence au silence
Pour relier les vivants
Dans l’absence
Passer la porte des ténèbres
Et que dans l’obscur
Brille une lumière.
À Mathieu et Françoise
L’essence où naît toute beauté
À l’homme la pensée seule ne peut suffire
Il faut mettre de l’âme et du cœur à l’ouvrage
Transformer en éther le moindre paysage
En grâce permuter la fresque du désir
Laisser la volonté dans l’œuvre s’évanouir
Ne garder que l’essence ou naît toute beauté.
Quand le vent court dans les grands pins

À la frange du crépuscule
Aux nues brunies sous les embruns
Quand le vent court dans les grands pins
Et que les cimes se déciment
Au firmament qui se dessine
On perçoit dans un va-et-vient
Un chant qui monte du lointain
Quand lasse la mer se retire
Et que la grève nue s’étire
Laissant la vague à son chagrin
Et au jour bleui qui recule.
Ton anniversaire
Quand je t’ai attendu, non je n’étais pas prête
Encore trop ingénue, je nouais dans mes couettes
Des rubans de velours, de satin, d’organdi
Et puis tu es venu… Tout à coup j’ai grandi.
J’ai rangé mon Patrick, celui qui essayait
La layette pour toi, point à point tricotée
Aujourd’hui suis passée devant cette fenêtre
De la maternité, chambre où tu devais naître.
C’était au mois de mai, trente-huit ans passés
Je ne regrette rien, nous nous étions trouvés
Moi, sortant de l’enfance et toi, mon tout-petit
Pour le pire ou meilleur, deux destins réunis.
Quand le pire est venu… Non, je n’étais pas prête
Ma vie s’est arrêtée Ô ! combien je regrette
La fille et son petit qui tirait sur ses couettes
Éternelle maman, c’est bien toi qui m’a faite.
Le mois anniversaire
Personne pour me dire que si grande douleur
Pouvait un jour de mai me traverser le coeur
Mai ! c’était le joli, le mois anniversaire
Celui de ta naissance, pas celui de l’ hiver.
À Blaise.
Quand l’aube se praline Dans le jour à venir Aux regrets du partir
Un petit miracle
Que cette parenthèse
Ce ballet étrange
Qui nous tient en éveil
Remaniement d’un temps
Au jour le jour semblable
Ne rien ôter
Ne rien ajouter
Garder intacte
Cette joie qui palpite
Dans l’éclosion
D’un jour nouveau
Que ramènerons-nous
Quand nos yeux se fermeront
Et que nos paupières deviendront
Plus lourdes que les pierres ?
Peut-être un peu de cette glaise
Que nous avons tant et tant pétrie
Et remaniée
Au creuset de l’amour
Et que nos mains retiennent
Comme un dernier secours
Ou ce gris et ce rose
Quand l’aube se praline
Dans le jour à venir
Aux regrets du partir.
Célestes sont les voix qui portent l’indicible aux portes du poème
Dans l’immense et l’infime, aux confins de l’étrange
Il est partout, partout, m’a révélé un ange
Dans le matin frileux, le crépuscule ardent
Dans l’opale irisée d’une larme d’enfant.
Il est partout, partout, m’a révélé un ange
Dans l’immense et l’infime, aux confins de l’étrange
Dans le rideau de pluie que traverse le jour
Ces lueurs perlées d’un elfe pris d’amour.
Célestes sont les voix qui portent l’indicible
Aux portes du poème écrit dans l’invisible
L’éternité s’exprime à travers le vivant
Entre nos yeux mi-clos œuvrent tous les printemps.