« La moindre fleur des prés apporte à l’abandonné le réconfort de son silence. »
Christian Bobin.
À quel moment avons-nous perdu le don de parler aux fleurs, aux arbres, aux rivières ? À leur confier nos chagrins, nos joies, nos espérances ?
L’eau, le soleil, sont les nourritures de ceux qui vont partir. Le soleil paraît tellement plus éclatant, plus majestueux, à celui qui s’en va. Par deux fois j’ai vu de ceux-là, leurs yeux boire la lumière pour en garder la trace, pour l’amener jusqu’à cet ailleurs où la nuit s’éternise. Nous sommes déjà loin, quand le corps comprend, quand face à l’ultime il devance l’esprit, que la vie même, dans sa plus noble nudité, est notre bien le plus précieux.
Nous foulons, piétinons en aveugles la nature, ce jardin d’Éden avec ses délices. Les hommes ont abandonné à la nature leur spiritualité. Partout où la lumière se pose, il y a un ange qui sourit, et son regard sur nous est rempli d’infinies consolations.
La nature ne peut mourir, l’infini y repose. L’un dans l’autre, ils se nourrissent d’absolu et de beauté. Nous qui avons perdu cet émerveillement nous le retrouvons intact à l’instant ultime, dans une union presque totale, entre celui qui part et la vie qui le quitte.
Notre enfance nous rejoint, cette compagne que nous avions délaissée pour jouer au grand. Comment avons-nous pu oublier de regarder le ciel ?
C’est en se fermant que nos yeux s’ouvrent à nouveau, comme le font ceux des enfants, dans la candeur et la transparence, dans l’éblouissement du cœur. Tout se dit, s’écrit, aux deux extrêmes de la vie et c’est peut-être à ces deux périodes, très courtes mais très intenses, que nous savons sans plus avoir besoin de poser de questions.